Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

11/11/2011

CMER et Communion… par Jean-Luc Blanc

1694_fix.jpgAprès avoir longtemps hésité à prendre part au débat sur la CMER,  c’est en repensant à tout ce qu’il m’a été donné de vivre ces dernières années que je me suis décidé à apporter ma pierre à l’édifice. C’est donc à partir d’un vécu qui par définition ne peut pas être neutre que je m’exprime.  C’est parce qu’après 9 ans dans l’Eglise Evangélique Au Maroc et déjà un peu plus d’un au Defap, ma conception de l’Eglise s’est nourrie de celles des autres en Afrique Subsaharienne, aux USA, en Afrique du Nord, en Suisse, en Allemagne que je peux parler aujourd’hui de la communion ecclésiale d’une manière autre. La communion vécue dans une Eglise comme celle du Maroc dépasse largement celle de la CMER  puisque là on trouve des baptistes, des Réformés, des évangéliques, des luthériens (même si c’est une Eglise membre de la CMER). Aucun de ceux qui ont vécu ou vivent cette communion n’accepteraient qu’on en remette en cause la réalité. En voyageant en Afrique, mais aussi ailleurs, je me rends compte que quelque chose de l’ordre de la communion se vit, justement dans la diversité de l’Eglise Universelle, quelque chose qui dépasse ce que je pouvais imaginer quelque chose qui ne dépend pas d’accords ou de désaccords théologiques, mais d’une personne qui rassemble, le Christ.


1. On achoppe sur la Communion…

communion-des-saints.jpgCe n’est pas une surprise pour moi de lire que certains collègues sont opposés à la présence de l’UNEPREF dans la CMER, ce qui me surprend plus, c’est les raisons invoquées pour en sortir, notamment,  le fait que ce soit une « Communion », comme s’il nous appartenait de choisir ceux avec lesquels nous voulons être  en communion ou non…. Lorsque nous disons, dans le Credo : « je crois à la Communion des Saints », que voulons nous donc dire ? Réduisons nous cette communion à ceux qui pensent comme nous ? Est-ce à nous d’en tracer les contours ?  Si je ne suis pas en communion avec tous les Réformés qu’en sera-t-il des baptistes, des pentecôtistes et… des Catholiques ?  Par ailleurs, lorsque nous nous accrochons aux définitions de la communion dans nos dictionnaires, n’oublions quand même pas que la CMER n’est pas francophone et que selon les langues, le sens du mot varie….

2. Ce qu’en dit la CMER

Pour m’aider à y réfléchir, je suis allé voir ce que les textes fondateurs de la CMER disent de cette Communion : « La Communion mondiale d’Églises réformées (CMER) est fondée sur l’unité, qui s’exprime de la façon la plus claire dans la Trinité. Au cœur de l’univers, il y a un Dieu en relation. […] La communion est le corps du Christ, elle repose sur cette réconciliation avec Dieu  et les uns avec les autres. […] La base de départ ecclésiologique de notre communion repose sur ce que Calvin considérait comme les marques authentiques de l’Église. L’Église est là ou la Parole de Dieu est prêchée et entendue et les sacrements correctement administrés. C’est ce qui fait naître l’Église. La CMER repose sur ce principe ecclésiologique et elle partage ces marques authentiques. Tel est le principe fondamental situé à la base de ce que déclare l’article III du projet de constitution de la CMER qui proclame: « les dons de l’unité en Christ par la reconnaissance réciproque du baptême, de la qualité de membre, de la communion de chaire et de célébration de la Cène, du ministère et du témoignage. »

3. Ce qu’en dit la Bible

Contrairement à ceux qui, dans certaines Eglises, recherchent une pensée unique pour tenter de reconstruire Babel, le texte biblique ne me paraît pas hostile à l’idée de diversité. Ce à quoi il nous invite n’est pas l’uniformité, ni même l’unité institutionnelle, mais la communion, cette communion que nous confessons dans le credo lorsque nous disons “je crois la communion des saints”. Cette communion est, dans l’Ecriture, indépassable. L’Eglise ancienne a cru bon d’expliquer ce qu’est “la sainte Eglise universelle (ou catholique)” par cette expression “la communion des saints” (en latin communio sanctorum).  Pas évidente, la traduction de l’expression latine permet d’aller dans deux directions différentes. La première traduction, la plus courante décrit l’Eglise comme “communauté des personnes saintes”. Bien sûr, il peut y avoir débat ici sur ce qu’on entend par “saints”, mais généralement on est d’accord sur la définition qui était celle de l’Eglise ancienne et qu’a reprise la Réforme : les saints sont les croyants qui placent leur confiance dans le Dieu de Jésus Christ. La communion des saints est donc  la communauté des disciples de tous les temps et de tous les lieux.  En ce sens le terme “communion des saints” serait synonyme de la proposition précédente “la sainte Eglise Universelle” et à moins de vouloir exclure de l’Eglise Universelle certains croyants, que nous le voulions ou non, nous sommes en communion avec tous. La seconde traduction possible, la communion aux choses saintes vaut aussi la peine qu’on s’y intéresse.  Il s’agit d’une communion de chacun avec le Christ, de cette  communion  offerte dans sa parole  et dans les sacrements. La question n’est pas alors « sommes nous en communion les uns avec les autres ? », mais  « sommes nous en communion avec le Christ ? ». Alors, faut-il choisir l’une de ces deux lectures... Non. Je ne le crois pas. La communauté des croyants vit de la parole et des sacrements.  Parole et sacrements fondent cette communauté  et la constituent en Eglise, Eglise qui vit d’une réalité qui lui est extérieure et dont elle ne dispose pas mais sans laquelle elle ne serait pas.  L’Eglise n’est pas un simplement une association de personnes  qui partagent une même orientation, des idées communes, mais regroupe tous ceux qui sont en communion avec un tiers, le Christ. 

Etant partis du credo, il importe de vérifier cela dans les Écritures, en particulier dans le Nouveau Testament : Donnée par le baptême, cette communion est celle de tout croyant incorporé au Christ par la participation à sa mort et à sa résurrection (Rom. 6).  Incorporés au Christ les croyants forment ce peuple en communion avec lui. Le Saint Esprit donné aux croyants fait d’eux une “communion dans un seuls Esprit”. C’est ce que développent des épîtres comme celles de Paul aux Corinthiens ou aux Ephésiens. La communion exprimée et vécue dans la cène est communion au Christ et à son corps, l’Eglise : “La coupe de bénédiction que nous bénissons, n'est-elle pas la communion au sang de Christ ? Le pain que nous rompons, n'est-il pas la communion au corps de Christ ?” écrit Paul (1 Cor 10/16-17). Ceux qui boivent la coupe et partagent le pain deviennent un, dira l’apôtre un peu plus loin.  La communion au Christ est inséparable de la communion à son corps, l’Eglise. On retrouve bien là les deux sens du credo. Un autre élément constitutif de cette communion était l’enseignement des apôtres. Ces paroles dans lesquelles l’ensemble de l’Eglise se retrouvait et communiait, ces paroles qui allaient devenir les Écritures dans lesquelles nous nous retrouvons tous.  Selon le Nouveau Testament, cette communion qui fait que l’Eglise est Eglise trouve donc sa source en Dieu. Elle est le reflet de la communion qui lie le Père, le Fils et le Saint Esprit. Avant d’être communion avec les frères et soeurs, elle est communion avec le Dieu dont l’être est déjà communion. Jean rappelle souvent cette dimension essentielle de la communion. Par exemple :  “ce que nous avons vu et entendu, nous vous l'annonçons, à vous aussi, afin que vous aussi vous soyez en communion avec nous. Or, notre communion est avec le Père et avec son Fils Jésus-Christ”, écrit-il.

Mais aussi, la communion est partage, partage des biens, des joies et des souffrances.  Les épîtres sont remplies d’appel des apôtres à manifester un peu de solidarité au nom de la communion avec les autres communautés, celles qui sont loi et qu’on ne connaît pas directement. La communion, participation aux souffrances des autres doit, à un moment ou à un autre devenir aide concrète, souvent partage financier. J’en veux pour preuve les  collectes organisées par Paul en faveur de l’Eglise de Jérusalem. 

Le Nouveau Testament souligne encore le fait que cette communion  n’est pas limité au présent mais qu’elle renvoie à un accomplissement  parfait “à la fin des temps”, le moment où le Dieu communion, Dieu de la communion sera tout en tous. (1 Cor. 15/24-28). 

Mais je voudrais encore rajouter une chose, c’est que le Nouveau Testament ne parle jamais de communion entre des Églises mais entre des croyants et Dieu et entre eux. Ce sont des hommes et des femmes qui sont en communion, pas des institutions. 

Quand au deuxième sens du mot communion, il découle du premier. Nous ne pouvons pas accepter d’avoir un même père sans accepter les frères et les soeurs qui vont avec. On le comprend aisément.

Ceci dit, la communion ne pourra jamais être confondue avec l’uniformité : la communion n’existe pas en opposition à la diversité mais elle est donnée avec et dans la diversité. Les diversités qui sont enracinées dans le témoignage biblique, les traditions, les spiritualités et dans les divers contextes culturels et historiques font partie intégrante de la communion et en manifestent la richesse. Bien entendu, je sais qu’il y a des limites à cette diversité. La diversité devient contestable quand elle rend impossible la confession commune de Jésus Christ comme sauveur. Elle perd sa légitimité dans l’Eglise lorsqu’elle est celle d’un courant théologique qui n’a pas sa source et son centre dans l’Ecriture....

4. Dans l’Eglise aujourd’hui

Depuis que je suis rentré en France et que je fréquente la paroisse de Massy, je me rends compte que c’est exactement ce que vit et ce que veut vivre cette paroisse qui, après plusieurs périodes difficiles, se relève en rassemblant des croyants de toutes origines considérant leur diversité (y compris théologique) comme une richesse. Depuis que je tourne un peu dans les Eglises de France pour y parler de la mission, c’est ce que je constate aussi dans de nombreuses paroisses, en particulier dans celles qui font preuve de dynamisme dans la durée. En me promenant ailleurs dans le monde, je me rends compte aussi que la Communion des Saints n’est pas juste des mots dans une Confession de Foi. Je suis heureux de voir que la plupart des Eglises que je rencontre n’ont pas peur d’un trop de communion !

Ayant dit tout cela, faut-il  que la CMER soit une « Communion » ou une « Fédération », comme semblent le souhaiter certains ?   Ce qui est certain, c’est que l’idée de fédération, très utile en France actuellement, n’a aucun contenu théologique. C’est un arrangement, un compromis ente la manifestation de l’unité et la rupture, un moindre mal. La Bible ne nous invite pas vraiment à nous « fédérer » avec nos frères et nos sœurs.. Nous ne confessons pas non plus une « fédération des Eglises », mais bien la « Communion des Saints »…  Et, puis, si nous vivons cette Communion des Saints plus particulièrement dans avec nos frères et nos soeurs réformés, pourquoi ne pas employer le mot avec eux aussi ?  Nous sommes déjà dans la même « Communauté » qu’un certain nombre d’entre eux, la Cevaa, ce qui sous entend un certaine communion me semble t-il…. Les statuts de la CMER parlent de « valeur ajoutée de la communion ». Ne courrons pas le risque de nous exclure nous même de ce qui est donné par Dieu….

Jean Luc Blanc

Commentaires

J'ai désiré demeurer en retrait dans le débat sur les relations à maintenir ou à couper avec la CMER, car c'est bien de cela dont il s'agit. L'UNEPREF est membre de la CMER depuis juin 2010, en effet, même si la décision officielle a été prise en permanente en 2006 et que l'accord officieux avait été donné en 2005, lors le la visite des responsables du COR, dont Jerry Pillay qui est actuellement le président de la CMER.

La question " faut-il adhérer à la CMER" n'est donc pas la bonne question. La question est "faut-il sortir de la CMER"

Mais si je prends la parole aujourd'hui c'est surtout pour dire ma reconnaissance à Jean-Luc Blanc qui a défini de la meilleure manière qu'il soit, du moins selon ma propre vision, ce que doit être la communion des Eglises Réformées. Nous savons ce que nous sommes et nous voulons le dire ou le confesser; mais mon adversaire n'est certainement pas celui qui ne comprend pas l'Ecriture de la même manière que moi. "Ce que Dieu demande de toi, c'est que tu ptatiques la justice ( le respect des créatures de Dieu) que tu aimes la miséricorde et que tu marches humblement avec ton Dieu. Cela je peux le vivre dans la Communion Mondiales d' Eglises Réformées. C'est à moi qu'est demandé cela, tout cela et rien que cela.

Écrit par : Girardet Philippe | 20/11/2011

Les commentaires sont fermés.