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13/05/2011

La CMER, une communion ?

images.jpegLa CMER, une communion ?

Est-il nécessaire, utile, souhaitable ou déplacé que notre Union d'églises adhère à la Communion mondiale d'Eglises réformées (CMER) ?

Ma contribution consistera en un examen rapide de 4 termes, tant il importe que l'on sache ce que les mots veulent dire et à quoi on s'engage, si on ne veut pas être taxés de légers. Ces 4 mots sont les suivants : Conseil, Alliance, Fédération et Communion. Ces mots ne sont pas synonymes ou équivalents : ils impliquent, chacun, un degrés de dépendance et d'engagement bien particulier.

Un Conseil est une instance de concertation et de décisions dans un certain nombre de domaines déterminés. Au synode national et général de Bagard (mars 2000), nos églises ont décidé de ne pas adhérer au Conseil permanent luthéro-réformé (le CPLR), pour deux raisons : cela nous aurait entraîné dans une multitude de débats avec des Eglises pour la plupart (sinon toutes) pluralistes ;  cela aurait constitué un choix de préférence qui signifiait un éloignement d'avec les églises évangéliques dont nous sommes proches à bien des égards. 

Personne n'ignore que depuis, le CPLR est devenu la CPLR, c'est à dire une Communion protestante luthéro-réformée. Une Communion, c'est tout autre chose ! Une communion oblige les partis concernés à un engagement total, sans restriction, les différences qui demeurent étant regardées comme des particularités mineures, des traditions sans grande importance. Dans une communion, toute expression d'une différence est vue comme une entorse, une velléité de division.

Il en est de même, d'ailleurs, avec le mot Union...

Notons au passage que notre Union d'églises appartenait jusqu'à maintenant au Conseil oecuménique réformé (COR). C'était un Conseil, regroupant des Eglises réformées de tendance évangélique. En face se trouvait l'Alliance réformée mondiale (ARM). Une Alliance, un peu comme une communion, implique un engagement plus ou moins irrévocable et touche aux domaines les plus importants.

La fusion (c'est un cinquième mot !) du COR et de l'ARM donne la CMER : Communion mondiale d'Eglises réformées. C'est une Communion, tout autre chose donc que le Conseil auquel nous adhérions auparavant. Elle signifie que rien ne fait plus obstacle entre ces Eglises pour un plein accord sur le sens de l'Evangile, sur la manière de comprendre les ministères ou les sacrements, sur l'espérance chrétienne. Accepter ce principe reviendrait, de fait, à nier l'existence même de notre Union d'églises, en France. Cela confirmerait ce qu'ont voulu dire certains : c'est le mauvais caractère de quelques vieux pasteurs qui a empêché que l'union des églises réformées se fasse en 1938. Nous n'étions pas prêts. Maintenant, ce temps est passé et rien ne s'oppose à ce que l'union enfin se réalise, nos différences ne touchant que des points mineurs. Si nous pensons ainsi, alors il est vrai que notre petite Union a quelque chose d'archaïque ou même de scandaleux.

Mais ce n'est pas l'existence de « notre petite Union » qui est le véritable enjeu. Le véritable enjeu, c'est le rappel du fondement même de la Foi, c'est à dire la personne de Jésus-Christ telle qu'elle est présentée dans l'Ecriture et l'Ecriture elle-même considérée comme Parole de Dieu (Ep 2.20). Le mot 'réformé' n'est malheureusement plus le garant d'un tel attachement. Comment pourrait-il donc être, à lui seul, un facteur de communion ?

Quelqu'un dira : Faut-il donc sortir de la Fédération protestante de France qui nous lie aussi  à des Eglises pluralistes ? La réponse est non, car le mot Fédération implique des engagements bien réels mais qui n'ont rien à voir avec ceux d'une Communion. Dans une Fédération, chaque parti peut (et doit) exprimer sa différence ou même sa réserve sans que cela constitue un manque de loyauté. Dans une fédération aucun renoncement n'est exigé, sinon celui de l'autonomie ou du manque de respect. 

Deux remarques encore. 

- Cette question est-elle importante ou secondaire, finalement ? Je crois qu'elle revêt une grande importance, car l'histoire d'Israël démontre qu'un des principaux reproches que Dieu fait à son peuple est celui des mésalliances qu'il a contractées, pour faire « comme les autres ». Faire une alliance, c'est faire un choix, à moins de n'avoir aucune identité, aucune ligne de conduite. Il y a une forme de fidélité qui consiste à dire non, non par étroitesse d'esprit mais par cohérence avec les engagements initiaux. Pour beaucoup, dire non passe pour être un manque d'amour. Mais dire non peut constituer un grand service que l'on rend aux autres, un appel à la conscience. Notre réserve vis-à-vis des Eglises libérales ou pluralistes n'est pas un rejet : elle est un appel à se tenir humblement dans la soumission « à ce qui est écrit » (Ac 25.14  26.22-23).

- En 1921, le professeur Emile Doumergue, doyen honoraire de la Faculté de théologie protestante de Montauban, a publié une brochure intitulée Union, Fusion, Fédération. Il y démontre que le désir d'union, sur le plan institutionnel, est le fait des Eglises libérales qui, ainsi, font passer au second plan les questions de doctrines. Les Réformés évangéliques, eux, préféraient être en fédération, ce qui était la garantie du respect des convictions de chacun. Non pas que les doctrines soient le tout de la foi ; mais nous n'envisageons pas la foi sans les doctrines. E. Doumergue écrit, au sujet des Eglises pluralistes : « Leur manière de comprendre l'Union cadre absolument avec leurs conceptions théologiques et ecclésiastiques ; notre conception théologique et ecclésiologique aurait disparu et aurait été remplacée par la leur ».

Si la CMER était un Conseil ou une Fédération, la question de notre adhésion pourrait peut-être se poser. Peut-être. Mais elle est une Communion. Il faudra donc décider si nous continuons à croire ce que nous croyons, avec les implications logiques que cela suppose...

Charles Nicolas 12 mai 2011