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05/11/2011

Méditation sur la notion de "communion" de Pierre-Alain Jacot

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La communion dans l'épître aux Philippiens

Dans son épître aux Philippiens, Paul mentionne à trois reprise la communion (koinonia). Au début de la lettre, il rend grâce à Dieu en raison de leur « communion à l'évangile, depuis le premier jour jusqu'à aujourd'hui » :

3 Je remercie mon Dieu chaque fois que je pense à vous. 4 Toutes les fois que je prie pour vous, je le fais avec joie, 5 en raison de l'aide (koinonia) que vous m'avez apportée dans la diffusion de la Bonne Nouvelle, depuis le premier jour jusqu'à maintenant. 6 Je suis certain de ceci : Dieu, qui a commencé cette œuvre bonne parmi vous, la continuera jusqu'à son achèvement au jour de la venue de Jésus-Christ. 7 Il est bien juste que j'aie de tels sentiments envers vous tous. Je vous porte en effet dans mon cœur, car vous avez tous part à la faveur que Dieu m'a accordée, aussi bien maintenant que je suis en prison que lorsque je suis appelé à défendre fermement la Bonne Nouvelle. 8 Dieu m'en est témoin : je vous aime tous avec la profonde affection de Jésus-Christ. 9 Voici ce que je demande à Dieu dans ma prière : que votre amour grandisse de plus en plus, qu'il soit enrichi de vraie connaissance et de compréhension parfaite, 10 pour que vous soyez capables de discerner ce qui est bien. Ainsi, vous serez purs et irréprochables au jour de la venue du Christ. 11 Vous serez riches des actions justes produites en vous par Jésus-Christ, à la gloire et à la louange de Dieu.

Philippiens 1, 3-11 (BFC)


Nous pouvons relever plusieurs aspects dynamiques de cette « communion à l'évangile » :

− Dieu, qui a commencé cette œuvre bonne œuvre, la continuera jusqu'à son achèvement (v. 6).

− Paul demande à Dieu dans sa prière : « que votre amour grandisse de plus en plus, qu'il soit enrichi de vraie connaissance et de compréhension parfaite » (v. 9), et il en conclut : « Ainsi, vous serez purs et irréprochables au jour de la venue du Christ » (v. 10).

La communion concerne des croyants en qui l'œuvre de Dieu n'est pas encore parfaite, mais seulement commencée. Cette communion ne concerne pas des croyants qui sont déjà purs et irréprochables, mais qui sont appelés à le devenir « pour le jour de Christ ». Ce statut particulier des croyants, à la fois justes et pécheurs, simul justus et peccator, a été réaffirmé à la Réforme. Il est transposables aux églises particulières.

Ce même dynamisme lié à la communion se retrouve au plus loin au chapitre 2 :

 1 Votre union avec le Christ vous donne-t-elle du courage ? Son amour vous apporte-t-il du réconfort ? Êtes-vous en communion avec le Saint-Esprit ? Avez-vous de l'affection et de la bonté les uns pour les autres ? 2 Alors, rendez-moi parfaitement heureux en vous mettant d'accord, en ayant un même amour, en étant unis de cœur et d'intention. 3 Ne faites rien par esprit de rivalité ou par désir inutile de briller, mais, avec humilité, considérez les autres comme supérieurs à vous-mêmes. 4 Que personne ne recherche son propre intérêt, mais que chacun de vous pense à celui des autres. 5 Comportez-vous entre vous comme on le fait quand on connaît Jésus-Christ: 6 Il possédait depuis toujours la condition divine, mais il n'a pas voulu demeurer de force l'égal de Dieu. 7 Au contraire, il a de lui-même renoncé à tout ce qu'il avait et il a pris la condition de serviteur. Il est devenu homme parmi les hommes, il a été reconnu comme homme; 8 il a choisi de vivre dans l'humilité et s'est montré obéissant jusqu'à la mort, la mort sur une croix. 9 C'est pourquoi Dieu l'a élevé à la plus haute place et lui a donné le nom supérieur à tout autre nom. 10 Il a voulu que, pour honorer le nom de Jésus, tous les êtres vivants, dans les cieux, sur la terre et sous la terre, se mettent à genoux, 11 et que tous proclament, à la gloire de Dieu le Père : « Jésus est le Seigneur ! ».

Philippiens 2, 1-11 (BFC)

La communion « d'esprit » ou « dans l'Esprit » est posée comme fondement, avec la « consolation (ou l'appel) en Christ », avec « l'encouragement (ou le soulagement) dans l'amour », avec la « compassion » (ou l'affection) et avec la miséricorde (v. 1). Il s'agit d'une question rhétorique qui appelle une réponse affirmative. S'il y a tout cela, Paul développe un certain nombre de conséquences destinées à rendre sa joie parfaite (v. 2) :

− en ayant à l'esprit la même préoccupation

− en ayant un même amour

− en étant une co-âme (ou un co-cœur) [traduction littérale]

− en pensant un [traduction littérale].

De ces affirmations pauliniennes, il découle que c'est parce qu'il y a « communion dans l'Esprit » qu'on est appelés à « penser un », et non pas parce qu'on « pense un » qu'il y a communion.

La dernière mention de communion dans l'épître se trouve au chapitre 3 :

 4 Pourtant, je pourrais aussi me réclamer de tels privilèges. J'aurais plus de raisons de le faire que qui que ce soit d'autre. 5 J'ai été circoncis le huitième jour après ma naissance. Je suis Israélite de naissance, de la tribu de Benjamin, Hébreu descendant d'Hébreux. Je pratiquais la loi juive en bon Pharisien, 6 et j'étais si fanatique que je persécutais l'Église. En ce qui concerne la vie juste prescrite par la loi, j'étais irréprochable. 7 Mais ces qualités que je regardais comme un gain, je les considère maintenant comme une perte à cause du Christ. 8 Et je considère même toute chose comme une perte en comparaison de ce bien suprême : connaître Jésus-Christ mon Seigneur, pour qui je me suis privé de tout avantage personnel; je considère tout cela comme des déchets, afin de gagner le Christ 9 et d'être parfaitement uni à lui. Je n'ai plus la prétention d'être juste grâce à ma pratique de la loi. C'est par la foi au Christ que je le suis, grâce à cette possibilité d'être juste créée par Dieu et qu'il accorde en réponse à la foi. 10 Tout ce que je désire, c'est de connaître le Christ et la puissance de sa résurrection, d'avoir part (koinonia) à ses souffrances et d'être rendu semblable à lui dans sa mort, 11 avec l'espoir que je serai moi aussi relevé d'entre les morts. 12 Je ne prétends pas avoir déjà atteint le but ou être déjà devenu parfait. Mais je poursuis ma course pour m'efforcer d'en saisir le prix, car j'ai été moi-même saisi par Jésus-Christ. 13 Non, frères, je ne pense pas avoir déjà obtenu le prix; mais je fais une chose: j'oublie ce qui est derrière moi et m'efforce d'atteindre ce qui est devant moi. 14 Ainsi, je cours vers le but afin de gagner le prix que Dieu, par Jésus-Christ, nous appelle à recevoir là-haut.

Philippiens 3, 4b-14 (BFC)

Si la communion « à la bonne nouvelle » et la communion « d'esprit », choses a priori désirables, s'inscrivent dans la dynamique du « déjà » et du « pas encore » du jour de Christ, il en est de même, à plus forte raison, de la « communion des souffrances » de Christ. Cette communion aux souffrances de Christ est devenu pour Paul si désirable qu'il considère tout ses privilèges comme des déchets (v. 8). Le changement de perspective où Paul passe d'un regard où il considère ces choses comme un gain à un regard où il les considère comme une perte (v 7) n'est pas à identifier complètement avec le moment de la conversion. En effet, Paul n'arrêtera pas dans ses lettres d'exhorter les chrétiens (d'origine païenne, c'est un comble !) à ne pas considérer la loi juive comme un gain. Lui même, même après avoir considéré tout ses privilèges comme des déchets, ne se sent pas pour autant avoir atteint le but (v. 11). Son désir de communion aux souffrances de Christ, il le décrit comme une course qu'il poursuit, comme un effort à atteindre un prix qui est encore devant lui (v. 13).

huge.91.458057.JPGOn pourrait penser que la réflexion de Paul est ici très individualiste. Il désire la communion aux souffrances de Christ, sous-entendu les souffrances que le Christ a souffertes pour les propres péchés de l'apôtre, avec l'espoir d'être lui-même ressuscité. Mais l'espoir de Paul s'élargit avec ce « aussi » (v. 11), qui ne concerne sans doute pas seulement le Christ, mais également l'ensemble des croyants. Ainsi, la communion aux souffrances de Christ n'est probablement, aux yeux de Paul, pas uniquement les souffrances que le Christ a souffertes pour sa petite personne, mais les souffrances que le Christ a souffertes pour le salut de l'ensemble des élus. La communion aux souffrances de Christ est donc également une communion aux souffrances que le Christ a souffertes pour le frère, l'église avec laquelle je suis, comme lui, comme elle, en communion à l'évangile et en communion d'esprit.

En quelque sorte, Paul demande aux Philippiens de prendre exemple sur lui et de renoncer à leurs privilèges, pour être en communion avec les souffrances que le Christ a souffertes, non seulement pour eux-mêmes, mais également pour des frères eux aussi encore pécheurs, mais appelés eux aussi à la pureté. La communion en Christ avec des frères et sœurs déjà graciés mais encore pécheurs est à privilégier sur tout ce que nous pourrions considérer dans notre vie chrétienne ou dans notre vie d'église particulière comme un avantage que les autres n'auraient pas.

Pierre-Alain Jacot, 4 novembre 2011

 

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